Mirovα, Creating Sustainable Value - Mars 2024

Publié le 20/03/2024

Bilan et perspectives marchés 

Les 7 Magnifiques et le High Yield: encore gagnants

Février s’affiche comme un très bon mois pour les actifs risqués, avec de nouveaux records franchis pour de grands indices. Le S&P 5001 passé au-dessus des 5 000 points pour la première fois de son histoire, après avoir progressé de 5,2 %2 sur le mois et le Nikkei a atteint des niveaux qui n’avaient pas été vus depuis 1989. Ces performances s’expliquent notamment par la poursuite de l’engouement autour de la thématique de l’intelligence artificielle (voir The Long View) et l’attrait toujours aussi vigoureux pour les grosses capitalisations américaines, notamment à la suite des résultats solides de Nvidia, Meta ou Amazon, les 7 Magnifiques tirant encore largement l’indice américain (+12 %)2. A bien y regarder toutefois, toutes n’ont pas connu un début d’année aussi positif que Nvidia (+60 % à fin février %)2  à l’image d’Apple ou Tesla clairement plus à la peine.

De manière générale les grandes capitalisations ont continué de surperformer, de même que les valeurs cycliques, par rapport aux défensives. Le S&P 500 enchaîne ainsi son 4ème mois de hausse consécutif. A noter que les valeurs bancaires régionales demeurent sous surveillance, leur indice ayant perdu 3 %2 sur le mois, après une chute de 10 %2 en janvier. 

En Europe, le marché actions affiche une progression plus modérée, + 2 %2, en dépit d’une nette surperformance des valeurs cycliques et alors que les gros poids de la cote surprennent globalement positivement (ASML, Novo Nordisk, LVMH, SAP…). Les publications de résultats ressortent en moyenne plus mitigées qu’outre-Atlantique alors que la croissance peine à y redémarrer, même si on notera une légère amélioration. Plus à l’est les marchés ont connu une forte hausse. Le Nikkei a en effet progressé de 8 %2, tout comme le marché chinois, qui affiche ainsi sa meilleure performance mensuelle depuis deux ans. Un rebond que l’on pourrait qualifier de tactique à ce stade, attribuable en partie au fort interventionnisme du gouvernement qui a notamment procédé à des achats d’actions. 

Sur les marchés obligataires les investisseurs ont dû digérer un léger sursaut de l’inflation au cours du mois, ce de part et d’autre de l’Atlantique. Cela les a conduit à repousser une fois de plus les dates de premières baisses de taux directeurs en l’occurrence à juin désormais, d’après le consensus pour la Fed3 comme pour la BCE4. L’inclination des banquiers centraux à patienter encore quelques mois afin de s’assurer du bon retour de l’inflation vers leurs niveaux cibles les y a encouragés. Face à la hausse des taux courts et longs, de 40 points de base pour le 10 ans américain à 4,3%2 et 23 points de base pour le 10 ans allemand à 2,41%2, les obligations d’État ont perdu du terrain, fléchissant de l’ordre de -1,5 %2 pour les Treasuries5américaines et -1 %2 pour les indices obligataires européens. En revanche, on observera sur le mois une poursuite du resserrement des spreads6 de crédit, tant investment grade7que high yield8, avec un marché primaire qui demeure vigoureux mais peine à satisfaire l’appétit des investisseurs pour ces classes d’actifs.

Aussi la hausse des taux courts et longs n’a-t-elle pas affecté le marché actions, ce qui met un terme, au moins temporaire, à la corrélation positive et inhabituellement forte entre actions et obligations à laquelle on a assisté tout au long de l’année dernière. En effet les marchés actions ont progressé malgré les hausses de taux, trouvant leurs propres catalyseurs de performance dans la macroéconomie comme la microéconomie. Les investisseurs démontrent ainsi leur conviction que l’économie se porte bien et le marché revient sur des comportements plus sains. 

Du côté des devises, le dollar progresse de 1 %2 et ressort renforcé par rapport aux devises du G10, après la hausse des taux américains au cours du mois. Le yen poursuit son repli, perdant 2 %2 en février, ce qui porte à 6 %2 sa chute depuis le début de l’année. Cela profite aux actions, comme le démontre la performance du Nikkei. 

Le Brent a progressé de 2 %2, contrairement aux prix des produits de base, notamment le gaz naturel en Europe. Son prix a reculé en effet de 18 %2 sur le mois, renforçant l’hypothèse d’une poursuite du mouvement de désinflation, avec une baisse des coûts de production pour les secteurs à forte intensité énergétique et un regain de pouvoir d’achat pour les ménages. 

Dernier fait notable du mois, l’exceptionnelle performance du bitcoin. Avec une hausse de 45 %2 à plus de 60 000 $, il réalise sa meilleure performance mensuelle depuis décembre 2020.

 

 

Wall street theatre picture Mirova

Le Graphique du mois

Graphique du mois marchés mars
Source: Bloomberg

Bilan et perspectives macro

Inflation surprise : pourquoi elle ne doit pas inquiéter 

Ce fut inattendu, l’inflation core10 au titre du mois de janvier et février a surpris à la hausse. Aux États-Unis, le CPI11 est ressorti à 0,4 %12 sur chacun de ces deux mois le mois contre des attentes à +0,3 %12 (base mensuelle). Un plus haut depuis 9 mois. Sur trois mois, en rythme annualisé, le CPI core se porte à 4,1%12. En parallèle d’un PPI13 sorti également nettement au-dessus des attentes et d'un déflateur sous-jacent de la consommation des ménages (core PCE deflator) à 2,8 %12, toujours supérieur à l’objectif de la Fed, la question de savoir si la poursuite de la dynamique de désinflation reste de mise en ce début d’année 2024 apparait tout à fait légitime.

Et pour cause les investisseurs, pilotés par les banquiers centraux n’ont eu de cesse de repousser les dates de première baisse de taux directeurs (désormais juin selon le consensus pour la Fed et la BCE) et de réviser leurs estimations quant à l’ampleur de ces baisses. Leurs estimations sont ainsi passées d’environ 160 points12 de base à fin décembre à 90-90 points de base12 de baisse attendue pour les taux directeurs américain et européen ; le nombre de baisses attendues sur l’année 2024 se réduit mécaniquement au nombre de 3-4 de part et d’autre de l’Atlantique alors qu’il était supérieur à 6 en fin d’année dernière.     

Il ne faut cependant pas voir dans les chiffres de ce début d’année le retour d’un mouvement inflationniste selon nous, ni le début d’un scénario similaire à celui des années 1970, avec une boucle prix-salaires. Cela démontre plutôt que la normalisation de la situation prendra davantage de temps que prévu, et qu’elle apparaîtra plus erratique également. Il faut, de plus, tenir compte du fait que cette inflation provient aussi d’effets de hausse de prix saisonniers et résulte pour partie de la hausse de cotisations spécifiques à verser en cette période, tels les frais de gestion de portefeuille, ou des frais d’assurances. Une reprise de l’inflation ne fait pas partie de notre scenario central. Le ralentissement de la croissance des coûts unitaires du travail aux États-Unis (lié aux gains de productivité ainsi qu’à la normalisation progressive du marché du travail) devrait au contraire continuer d'exercer une légère pression baissière sur l'inflation durant les prochains trimestres. 

D’ailleurs selon le beige book14 de la Fed15, les entreprises signalent une amélioration de la disponibilité et de la rétention de la main-d’œuvre, ce qui est cohérent avec la baisse observée du taux de démission des salariés. Plusieurs Etats notent également un assouplissement des pressions inflationnistes, en partie parce que les entreprises ont de plus en plus de mal à répercuter les hausses de coûts sur leurs clients. Par ailleurs les chaînes d'approvisionnement continuent de se normaliser et la baisse des prix des biens, facteur de désinflation important dans les économies développées ces deux dernières années, devrait se poursuivre cette année. 

Aussi les créations d’emploi non agricoles se sont accompagnées d’une croissance plus modérée des salaires (0,1 %12 sur le mois, 4,3 %12 en glissement annuel, contre 4,4 %12 en janvier), d’un recours toujours plus important au travail temporaire et d’une hausse du taux de chômage.

Par ailleurs ces surprises d’inflation ne semblent pas inquiéter la banque centrale américaine outre mesure. Ainsi Jerome Powell a précisé début mars devant le congrès que l'inflation avait reculé de manière « substantielle » après avoir atteint en 2022 un pic de 40 ans, et que « la Fed n’était plus loin d’avoir la confiance nécessaire pour baisser les taux ».

La BCE lui a emboîté le pas lors de son comité début mars en abaissant ses prévisions d'inflation (et de croissance) pour la zone euro cette année. L’inflation attendue pour 2024 se situe désormais à  2,3 %12 contre 2,7 %12 il y a seulement 3 mois !, ce alors que les anticipations pour 2025 et 2026 sont tombées à 2 %12 et 1,9 %12 respectivement. 

Etats-Unis : un possible no landing16? 

La croissance américaine devrait dépasser 2 %17 cette année hors choc exogène, c’est-à-dire quasiment le double de ce que le consensus attendait il y a encore quelques mois. L’acquis de croissance de début d’année s’avère en effet nettement supérieur aux prévisions initiales. Les 3,2 %17 de croissance annualisée réalisés au quatrième trimestre 2023, dont une large part provienne de la consommation privée, expliquent en partie cet écart, de même que les données des deux premiers mois 2024, en ligne avec une croissance supérieure à 2 %17.Pour rappel, les PMI manufacturier et services, y compris les composantes nouvelles commandes, ont monté, parallèlement à la publication de bons chiffres de l’emploi, à une dynamique des refinancements hypothécaires favorable à l’amélioration des conditions financières et à un effet richesse positif pour les ménages, etc.)

Sur le marché du travail en particulier, nous avons assisté à de solides créations d'emplois, malgré une légère hausse du taux de chômage. Selon le Bureau of Labor Statistics des États-Unis, la masse salariale non agricole a bondi de 275 000 emplois en février après une hausse révisée à la baisse, mais toujours décente, de 229 000 en janvier. La moyenne des créations d’emplois sur les trois derniers mois ressort à 265 000, autrement dit supérieure à la moyenne sur les 12 derniers mois (229 000). 

Autre indicateur positif, l’indice de confiance des CEO concernant les perspectives économiques aux États-Unis (sondage trimestriel basé sur leurs attentes au cours des 6 prochains mois) dépasse pour la première fois depuis 2022 sa moyenne historique.

Dans ces conditions, certains se demandent si l’économie US ne se trouverait pas sur le point de réaccélérer et, par suite, d’alimenter un rebond de l’inflation de repartir à la hausse. Raphael Bostic de la Fed d’Atlanta parle à ce sujet d’une « exubérance refoulée » qui n’attendrait plus que le signal de la baisse des taux directeurs pour se matérialiser.

À ce stade il nous semble trop tôt pour conclure. Une des variable clé pour les prochains trimestres pourrait résider dans la poursuite ou non des gains de productivité réalisés par l’économie américaine. Sur les trois derniers trimestres, ils ont avoisiné les 4 %17 en rythme annualisé, soit un niveau équivalent à celui de la fin des années 90, marqué par une poursuite du cycle bien au-delà des attentes. Quoi qu’il en soit les conditions semblent d’ores et déjà réunies pour un scenario de soft landing réussi voir de no landing, et nous restons en ce sens plus agressifs que le consensus. 

L’Europe a encore du mal à trouver sa voie 

En Europe aussi, la désinflation s’est faite plus hésitante depuis le début de l’année, mais sans pour autant que cela ne constitue un point d’inquiétude. L’effet saisonnier représente une composante importante dans le léger rebond de l’inflation.

Plus que ces mouvements temporaires de l’inflation, ce que scrute attentivement la Banque centrale actuellement se trouve plutôt du côté de l’emploi et des salaires. Sur ce front, les chiffres démontrent toujours une forte solidité, ce qui explique que la première baisse de taux ne devrait pas intervenir avant le début du mois de juin. Malgré une stagnation économique en zone euro, le chômage poursuit en effet sa tendance baissière, affichant un taux de 6,4 %17 en janvier, après un niveau de 6,5 %17 en décembre dernier. Face à un resserrement structurel de l’offre de main d’œuvre, les entreprises ont tendance à conserver leurs salariés, voire à embaucher, en anticipant une reprise économique au deuxième semestre. 

Ce resserrement du marché du travail est favorable aux salariés, toujours en position de force en matière de négociation salariale. Le discours belliqueux de Christine Lagarde face à une future baisse de taux s’explique en grande partie par ces éléments. La BCE18 va se montrer très attentive aux résultats des négociations salariales qui se déroulent au cours de ce premier trimestre. Les salaires pourraient en ressortir sur une hausse de 4 %17 à 5 %17. Or, pour être en ligne avec un objectif d’inflation à 2 %, la BCE privilégie une croissance des salaires autour de 3 %17. Nous estimons que les niveaux de salaire devraient se normaliser en zone euro, comme cela commence à être perceptible dans les offres d’emploi, validant ainsi l’hypothèse d’une baisse des taux en juin. En zone euro, l’inflation pourrait retomber autour de 2 %19 d’ici la fin de l’année, sans redescendre plus bas, sur des niveaux tels que connus pré-Covid. 

Sur le plan plus général de la croissance, la reprise se fait attendre, mais nous semblons avoir touché un point bas, comme en témoignent les dernières publications des indices PMI, qui affichent un léger rebond, ainsi qu’un frémissement de reprise au niveau des services. L'indice PMI composite de février atteint son plus haut niveau depuis 8 mois. À cela se conjugue un meilleur sentiment des industriels, même si celui-ci reste sur de faibles niveaux. L’amélioration des nouvelles commandes constitue un point positif de même que la baisse des prix de gros de l'énergie qui devrait bénéficier à terme aux industries à forte intensité énergétique. Un point d’attention pour les prochains mois devra se chercher du côté de la construction et de l’immobilier, en particulier en Allemagne et en France. Le nombre de permis de construire s’inscrit en repli, le nombre de crédits immobiliers reste faible. Une détente des conditions de crédit constituerait un signal positif fort en faveur de la reprise.

Chine : voir la réalité derrière de rebond du marché 

En Chine, la bonne performance mensuelle des actions domestiques, en partie liée aux mesures mises en place par les autorités afin de stabiliser le marché, ne doit pas faire oublier les difficultés structurelles de l’économie., les ménages chinois subissent un effet richesse négatif lié à l’effondrement de l’immobilier et la consommation domestique peine à rebondir. Du côté de l’offre, les données industrielles restent poussives avec un indice PMI manufacturier en contraction pour le cinquième mois consécutif en février (à 49,1, toujours inférieur à 50). 

La dynamique des prix à la consommation ressort proche de zéro contrairement aux pays occidentaux, alors que celle des prix à la production affiche une baisse sur un an. Les plans de relance budgétaire au service de l’offre et non de la demande n’ont fait qu’accentuer cette tendance jusqu’à présent. Ce qui fait dire à certains que la Chine devrait continuer à exporter ses pressions déflationnistes dans le reste du monde cette année, via un rebond de ses exportations.

Enfin le gouvernement chinois s’est fixé un objectif de croissance du PIB20 de 5,0 %19 pour la deuxième année consécutive. Objectif atteint, voire dépassé l’année dernière, mais à priori plus ambitieux cette année. Une certitude : d’autres mesures de relance monétaire et budgétaire vont venir, y compris un potentiel soutien direct à la consommation des ménages, si la dynamique des dépenses devait s’estomper dans les prochains mois.

Les résultats des entreprises scrutés par les marchés  

Le saison des résultats touche à sa fin aux États-Unis et ceux-ci ont dépassé les attentes. En effet, trois quarts des entreprises ont publié des résultats meilleurs qu’attendus et plus de la moitié ont dépassé les prévisions de chiffre d’affaires. Le taux de croissance anticipé pour les entreprises américaines en 2024 est de 10 %19 à 12 %19. A la suite de ces résultats, il faut noter une augmentation des valorisations sur le compartiment technologique, malgré 40 centimes de hausse sur le taux américain à 10 ans. Un phénomène, qui démontre que les investisseurs se montreront prêts à payer plus cher pour participer à cette croissance. De tels niveaux de valorisation mettent une certaine pression sur les entreprises concernées ; une baisse des taux permettrait de la faire retomber en partie.   

En Europe, les trois quarts des entreprises ont publié leurs résultats, mais seule la moitié dépasse les attentes. Sur le chiffre d’affaires, là encore, un peu moins de la moitié surpasse les prévisions. Il s’agit du trimestre le plus faible depuis le T4 de 2019 et de nouvelles dégradations sur les prévisions de croissance anticipée des entreprises en 2024 sont envisageables. 

The Long View

Investisseurs : même pas (small) caps !

La sous-performance des petites et moyennes capitalisations (small & mid caps) depuis plusieurs mois prend des airs de phénomène de fond, alimenté par des facteurs cohérents, dont la hausse des taux formait la trame. Il présente aussi des aspects assez mécaniques. En schématisant à l’extrême, il provient de la vente des plus petites valeurs par les investisseurs voulant exposer, notamment, leurs portefeuilles aux perspectives de croissance très soutenue de l’Intelligence Artificielle (IA). Il ne se trouve en effet plus une entreprise, une université, une organisation plus ou moins étatique qui ne valide désormais le lancement de projets de recherche ou de développement d’envergure sans y avoir intégré une composante assise sur l’IA. Or, il faut pour cela accéder, par exemple, aux produits de Nvidia… si ce dernier daigne vous les fournir sous des délais raisonnables et à des prix décents. Chacun aura compris que jamais perspectives de développement d’une industrie n’avaient paru plus limpides, et cette fois sans les hypothèses audacieuses que les marchés avaient prises au début des années 2000 pour modéliser le cours des valeurs dites internet. 

Conclusion ? Aucun investisseur actions ne peut désormais oser se passer d’actions Nvidia. Et comme nous nous trouvons dans une période où la création monétaire tous azimuts paraît révolue, il faut bien trouver de quoi financer le renforcement sur Nvidia ou toute autre compagnie à peu près équivalente à forte capitalisation (large caps). Dans ce contexte, alléger les smalls & mid caps constitue une option d’autant plus rationnelle que la hausse des taux pénalise ces valeurs souvent perçues comme offrant le moyen de miser sur la croissance ou sur la consolidation. Par ailleurs, rappelons que les années 1970 avaient montré que la capacité d’une entreprise à préserver voire accroître ses marges en période inflationniste dépendait très largement de sa taille : les plus gros acteurs surperformaient leurs pairs plus petits, avec quelques exceptions. Enfin dans certains secteurs, les niveaux d’endettement relatifs ne jouent pas en faveur des petites sociétés, plus endettées en moyenne que les plus grandes de leurs concurrentes. La divergence induite par ce comportement – vente de small & mid caps pour financer l’achat de large caps – ne surprendra donc pas. Elle s’auto-alimente. 

La question porte alors sur ce qui pourrait la freiner. Pas besoin de recourir à des prévisions sophistiquées : c’est l’évolution des taux, non les niveaux qu’ils ont atteints, qui procure la clef de voute évidente de l’éventuel retour en grâce des small & mid caps. Toutefois, il convient de distinguer deux situations : l’une en Europe, l’autre en Amérique du Nord.   

Jouer des valeurs technologiques, ou la croissance de l’Amérique ?

Bien que partageant de nombreuses caractéristiques, les petites et moyennes capitalisations ont des dynamiques de valorisation qui ne se fondent pas sur les mêmes sous-jacents selon que nous parlons d’Europe ou d’Amérique du Nord. 

Small & mid caps europénnes : jouer la baisse des taux.

Pendant longtemps, les small & mid caps européennes avaient permis de jouer des tendances somme toute très domestiques, mais la Mondialisation y avait mis fin : peu à peu, ce segment du marché a endossé la fonction de vecteur d’exposition à la croissance mondiale, tout en ajoutant une composante d’innovation qui faisait défaut aux larges caps. 

C’est donc sans surprise que la hausse des taux a pénalisé ces valeurs, jusqu’à ce que leurs multiples de valorisation indiquent des décotes record, et que nous ne comprenons tout simplement plus.

Le MSCI Europe small caps a un P/E21 actuellement de 11,6x22 sous sa médiane sur vingt ans, de 14,6x22, quand celui du MSCI Europe, à 12,3x22, se situe légèrement en dessous de cette médiane, à 12,9x22.

Small & mid caps US : jouer la croissance US.

Vu des Etats-Unis, le monde développé se limite parfois aux Etats-Unis. Cela en tous cas, se retrouve un peu dans les small & mid caps locales, qui pour l’essentiel, représentent des valeurs domestiques dans d’importantes proportions. Autre différence avec les small & mid caps européennes, celles d’Amérique du Nord ne reposent pas sur l’innovation voire la disruption. Elles permettent plutôt de s’exposer à des croissances assez stables, fondées sur l’expansion d’un modèle opérationnel de qualité que le management déploie peu à peu sur l’ensemble des états américains. 

Le MSCI US small Cap a un P/E actuellement de 16,2x23 sous sa médiane sur vingt ans, de 19,1x23, quand celui du MSCI US, à 19x23, se situe très au-dessus de sa propre médiane, à 15,4x23

                                                                                               P/E des indices MSCI sur vingt ans

Long view Graphique


Tous les chemins mènent aux small & mid caps.

Si les taux ont bel et bien atteint un plateau, alors les small & mid caps européennes ressemblent à une opportunité. Si la croissance nord-américaine se comporte comme Mirova l’attend depuis plus d’un an, c’est-à-dire bien mieux que le marché ne le croit, alors les small & mid caps nord-américaines ressemblent aussi à une opportunité. Et si, comme nous croyons le percevoir, les taux baissent un peu et que la croissance US tient bon, alors, ce sont toutes les small & mid caps qu’il faudra reconsidérer.

En un sens, il faut même voir au-delà du contexte macroéconomique pour parvenir – une fois de plus – à la même conclusion sur ce segment du marché, notamment sa partie européenne : la quête d’exposition à des valeurs à même de bénéficier de ruptures technologiques comporte trop de risques si elle ne se matérialise qu’à travers le portage de quelques large caps seulement. Cela comporterait trop de risques à la moindre déception sur Nvidia par exemple, tandis que le potentiel d’appréciation le plus élevé se situe forcément chez de plus petites entreprises.

Autre écueil à éviter : opposer systématiquement les larges caps aux small & mid caps ; les secondes apportent la solution de compléter les premières, pour accroître la probabilité qu’un portefeuille donné profite des perspectives de croissance qu’offre la révolution de l’IA et de ce qu’elle induit pour de nombreuses industries. Au vu des niveaux de valorisation désormais atteints, le moment nous paraît particulièrement propice pour revenir sur ces valeurs. Les marchés les ont délaissées pour des raisons rationnelles, mais dépendantes de circonstances qui s’atténuent voire disparaissent.

L’histoire des marchés a plusieurs fois cruellement rappelé que les changements apparents de paradigme ne laissent, quelques années après leur invalidation, que le souvenir de simples anomalies. La valorisation actuelle des small & mid caps semble relever de cette catégorie. 

Synthèse 
Vues de marchés

Vues mars résumé

Vue mars créditVue mars DurationVue mars cash
1 Le S&P 500 est un indice boursier basé sur 500 grandes sociétés cotées sur les bourses aux États-Unis
2 Source : Bloomberg
3 Réserve fédérale des Etats-Unis
4 Banque Centrale Européenne
5 Titres du Trésor américain
6 Ecart
7 Notations des agences de rating situées entre AAA et BBB- selon l'échelle de Standard & Poor's
8 Haut rendement
9 Source : Bloomberg
10 La core inflation est une inflation dont on a retiré certains éléments fluctuants
11 Consumer Price Index, indice des prix à la consommation
12 Source : Bloomberg
13 Plan pluriannuel d’investissement
14 Le Livre beige est un rapport écrit de la Réserve fédérale américaine. Répondant au nom de « Résumé des commentaires des conditions économiques actuelles des Réserves fédérales de District »
15 Réserve fédérale des États-Unis
16Absence d’atterrissage
17 Source : Bloomberg
18 Banque Centrale Européenne
 19Source : Bloomberg
20 Produit Intérieur Brut
21 Price-earnings ratio est un indicateur utilisé en analyse financière et boursière
22 Source : Bloomberg
23 Source : Bloomberg
24 Le « spread » est l'écart ou la différence entre les deux prix d'un actif dans le secteur financier. D'une part on a la valeur de l'achat et de l'autre on a le prix de vente.
25 Le Trading Range est un indicateur pertinent du marché notamment pour les indicateurs stochastiques.
26 Le repricing consiste à automatiquement changer ses prix en fonction de la concurrence
27 Atterrissage en douceur
28 Ré-estimation
29 Bénéfice par action
30 Banque Fédérale americaine
31 Absence d’atterrissage
32 Les taux d'intérêt sont en baisse et la courbe de rendement est plus inclinée.